La vocation viendra plus tard
Comment vient une vocation d'auteur ? me demande-t-on parfois. Elle n'est pas venue : nous nous sommes croisés fortuitement, elle et moi. J'ai commencé à écrire sans vocation, juste pour voir.
Sommeil
Je n'ai jamais rêvé d'être auteur durant ma jeunesse. Lecteur bibliovore, oui, mais pas auteur. J'ai englouti l'Odyssée dès ma prime jeunesse sans jamais rêver d'en écrire la suite : le personnage d'Ulysse m'a fasciné, et il est resté le héros de ma jeunesse. Ulysse, mais pas Homère. Un seul professeur de lettres m'a incité à faire carrière dans l'écriture, c'était celui de prépa, la veille des concours. Le lendemain, je n'y pensais plus. Il y a des explosifs à déclenchement tardif.
Frémissements
À la sortie de l'Essec, je deviens créatif publicitaire, métier diamétralement opposé à l'écriture : mieux payé, plus stressant. Un vocabulaire de 800 mots maximum y est recommandé. 800 mots que j'apprends quand même à bien placer, notamment dans les dialogues.
Pour me défouler, en 1993, j'écris un "roman dont on est le héros" pour mes enfants. Et j'y prends un vif plaisir. Je découvre que l'écriture d'une histoire en 400.000 signes m'amuse plus que celle d'un film de pub de 30 secondes. Ce gros pavé interactif, à l'intrigue très complexe, n'aura que cinq lecteurs : mes trois enfants et mes deux neveux. Malgré leurs encouragements, je ne le présente à aucun éditeur, jugeant que le sujet n'est pas assez intéressant. Et même franchement ringard.
Le sujet ? Ah, le sujet ! C'était l'aventure d'un petit garçon... pensionnaire dans un sinistre collège où une bonne partie des professeurs sont des sorciers. Cela cinq ans avant le premier Harry Potter. Ô rage, ô désespoir, mon Pensionnat Saint-Arnulphe avait dressé ses tours et jeté ses sortilèges cinq années avant le Collège Poudlard ! Bizarrement, cette claque à retardement me stimule : elle me donne une vague envie de revanche.
Éveil
Été 2002 : une chute de scooter m'empêche de faire du vélo pendant les vacances. Pour m'occuper, ma fille me suggère de participer à un concours de nouvelles. Pari tenu. Et, à ma grande surprise, ça se passe mieux que bien. Du coup, j'écris quelques autres nouvelles, pour d'autres concours.
J'ai le bonheur d'en perdre quelques-uns, parfois de peu, ce qui me permet de faire la connaissance de quelques récidivistes des podiums (nous serons tous publiés un peu plus tard). Ainsi se noueront de belles et perdurables amitiés.
J'ai aussi le bonheur d'en gagner quelques autres, plus de 50, dont beaucoup de grands, en France et en Belgique, ce qui me donne un début de confiance en mon écriture. Mes nouvelles sont publiées dans de bons recueils collectifs, dans quelques magazines. Lors de remises de prix, je rencontre des jurés écrivains tels que Serge Brussolo, Henri Vernes (le père des Bob Morane), Grégoire Polet, qui m'incitent à tenter l'aventure de l'édition. Et c'est ce que je.