[http://www.cathulu.com/archive/2008/08/18/tout-le-monde-il-est-beau-tout-le-monde-il-est-gentil.html]
[http://confrerie2010.canalblog.com/archives/2010/02/16/index.html]
[http://lecture-ecriture.com/1588-L'%C3%A9tage-de-Dieu-Georg]
[http://fattorius.over-blog.com/article-l-etage-de-georges-flipo-45090065.html]
[http://cdcoeurs.over-blog.net/article-l-etage-de-dieu-de-georges-flipo-51167484.html]
[http://lacavernedankya.canalblog.com/tag/Georges%20Flipo]
[http://dasola.canalblog.com/archives/2009/01/05/11904252.html]
[#ANCHOR_Text3]
[#ANCHOR_Text4]
[#ANCHOR_Text1]
[./6._l27etage_de_dieu.html]
[./7._le_vertige_des_auteurs.html]
[./7._le_vertige_des_auteurs.html]
[./17._mon_seul_reseau2c_les_faceturs.html]
[./18._actualite2c_vers_le_blog.html]
[./16._la_blogochose.html]
[./15._vide.html]
[./14._encore_plus_tard.html]
[./13._a_venir2c_plus_tard.html]
[./12._tous_ensemble2c_mais_sans_plus.html]
[./11._la_commissaire..._club.html]
[./10._la_commissaire..._vers.html]
[./9._le_film_va_faire_un_malheur.html]
[./8._qui_comme_ulysse.html]
[./7._le_vertige_des_auteurs.html]
[./5._la_diablada.html]
[./4._la_radio.html]
[./3._vie_publiee.html]
[./2._vie_anterieure.html]
[Web Creator] [LMSOFT]
Quelques extraits de L'Étage de Dieu

 Il y avait sept étages. Le septième, c'était celui de Dieu.
  Dans l'agence de publicité Théodos & Associés, toute carrière ne pouvait être qu'ascensionnelle, on l'avait expliqué à Tanguy dès son entrée. Au rez-de-chaussée, derrière le hall d'accueil, il y avait les services généraux et les coursiers. Les seuls qui avaient le droit de sentir la transpiration. Au premier, la fabrication, le studio d'exécution et les stagiaires, le petit peuple taillable et corvéable sans un merci. Au deuxième, les départements hors-médias, le marketing direct, la promotion des ventes, ceux qui n'osaient pas toucher à la publicité ; on parlait d'eux avec un sourire condescendant, comme de cousins d'Auvergne. Au troisième, la création. Jadis, elle avait occupé le cinquième, mais elle était redescendue - un signe des temps. Au quatrième, les commerciaux, les chiens de chasse : ils tenaient les clients, ils rapportaient l'argent. Au cinquième, la finance-comptabilité qui traquait et qui encaissait, le département médias qui brassait les millions, et les Relations Humaines qui considéraient toute humanité comme trop humaine. Au sixième, les seigneurs et les salles de bal : les directeurs et les espaces de réunions.
   Le septième, c'était l'étage de Dieu.
  Achille Théodos, le président Théodos, savait que personne au sein de l'agence ne l'appelait Achille, ni Théodos, encore moins le Grec ou le président. On disait Dieu, et il en parlait avec un sourire indulgent. Il régnait sur l'agence, elle n'était qu'une cathédrale à sa gloire.

(L'Étage de Dieu, in L'Étage de Dieu)


* * *


   Tandis qu'il conduisait, appliqué, Jacek sentit qu'elle le regardait fixement.
-     Vous êtes toujours comme ça, Jacek, un peu coincé, moitié séminariste, moitié majordome ? Si c'est un genre que vous vous donnez, vous avez tort, Jacek. Pour progresser, vous allez devoir apprendre à trouver votre style en société. Vous êtes bosseur, intelligent, bien foutu, mais pour aller plus loin, ça ne suffira pas. Vous allez devoir apprendre à vous imposer. Apprendre à plaire, et même à déplaire. Ce qu'il vous reste à travailler, c'est le plus dur, parce qu'on ne peut l'apprendre qu'en leçons particulières : partager un petit déjeuner avec un journaliste, discuter avec un député, sans rien avoir à lui demander, juste pour qu'il vous trouve très bien. Echanger des banalités d'un ton spirituel avec la femme d'un dirigeant, quand vous la croisez le soir à l'Opéra. Vous comprenez ce que je veux dire ?
-     Je sais, dit-il humblement, il faut que je progresse, surtout en maîtrise de la langue.
-     Ouh, ouh, la maîtrise de la langue, la maîtrise de la langue ! gloussa-t-elle. La maîtrise de la langue, vous n'allez pas manquer de candidates pour vous la faire travailler ! La maîtrise de la langue !
    Et elle agita frénétiquement un petit bout de langue entre ses lèvres rose nacré.
-     Excusez-moi, dit-il, embarrassé, je ne savais pas, j'ai dû employer un mauvais sens.
    Elle lui tapota brièvement la main :
-     Mais non, Jacek, c'est moi qui m'excuse. Je vous taquine. Il ne faut pas m'en vouloir, je suis un peu soûle.

(La maîtrise de la langue, in L'Étage de Dieu)


* * *

   Le vendeur la regarda comme si la visite du rayon devait dépendre du physique de la demanderesse.
-     C'est pour vous ?
-     Non, c'est pour un jeune collègue, assez porté sur la gaudriole.
    Le mot était sorti, tout seul, échappé, et Sophie se demanda si c'était le bon. Il fallait préciser, très vite :
-     Il va bientôt se marier, et nous voulons lui faire une blague, lui offrir quelques livres croustillants - toujours ce problème de vocabulaire, Sophie - pas du porno, non, mais du bien salé, de l'imaginatif.
    Le vendeur la jaugea une nouvelle fois, puis l'emmena. Sophie sentait qu'elle était rouge, très rouge. Elle sentit aussi un petit picotement.
-     C'est ici, derrière la caisse. Nous devons en interdire l'accès aux mineurs.
    Derrière la cloison de la caisse, il y avait une petite salle, mal éclairée. Rien que pour ça. Sophie fut impressionnée : il y avait là près de mille livres, mille livres sur ces choses dont les hommes parlaient avec de gros rires. Lesquels choisir ? Elle n'allait pas les feuilleter là.
-     Vous pourriez me conseiller ? Je suis pressée.
    Le vendeur semblait un familier du rayon. Même pour un bel homme comme lui, c'était donc normal ? Il extirpa quelques livres de l'enfer et la dévisagea, d'un bon sourire de mâle réjoui.
-     Celui-ci, c'est côté messieurs, celui-ci, c'est côté dames : cela dépend des goûts de cette personne.
    Il avait prononcé les deux derniers mots avec une conviction exagérée, pour bien montrer qu'il ne croyait pas en son existence.  Et Sophie savait qu'elle était si rouge que cela devait se voir sous son maquillage. Et puis, elle ne s'était pas maquillé les oreilles…
-     Et pour terminer, celui-là, c'est un florilège des plus belles pages de nos grands auteurs. Rien que des classiques.     Vous verrez, La Fontaine, Musset, Apollinaire, et les autres, ils en avaient, de l'imagination ! Et les mots pour le dire. Le titre du recueil est très joli : Les lèvres encore chaudes...
    Il regarda Sophie d'un air entendu. Elle sentit qu'il allait lui proposer un verre, un rendez-vous.
-     Je prends, je prends, dit elle, palpitante.
    Elle quitta précipitamment le magasin. Elle tenait, serrée contre elle, toute la lubricité du monde. Et le petit picotement était devenu douce brûlure.

(Dans la chaleur de la doc, in L'Étage de Dieu)


* * *


   La situation était pire encore que celle annoncée par Grumillard : les services généraux avaient disposé les deux tables face à face, pour que la cohabitation soit vraiment confrontation. Et si l'on pardonnait la trop grande bouche, l'intruse était presque belle, ce qui choqua Hubert : il n'y avait jamais eu de jolies filles au département comptable, la directrice administrative y veillait et montrait d'ailleurs le bon exemple.
-     Bonjour, je m'appelle Flore, dit l'occupante.
-     Et moi, Jardinier, Hubert Jardinier.
    Il ne lui avait pas serré la main, il ne s'était pas assis, il hésitait sur la conduite à adopter : afficher une attitude hostile, qu'il enrichirait de mesquineries et de vexations durant un an, ou tomber tout de suite amoureux. Il se donna une journée pour y réfléchir.
-     Flore, Jardinier, c'est drôle, non ?  s'esclaffa-t-elle
 Et Hubert comprit que la journée, ce serait trop long.

(Un écrivain est né,  L'Étage de Dieu)

* * *

 Quand tout eût été consommé, le Sphinx a étudié la liste des participants. Je le voyais s'arrêter en bas, concentré, certainement sur mon nom, il prenait de l'élan pour le prononcer :
-     Eh bien, monsieur… - il n'avait pas pris assez d'élan - monsieur… monsieur… Vuillard, c'est très bien, je vous remercie de me donner raison.
    Et le Sphinx s'est lancé dans un grand exposé prophétique sur la sclérose, le clonage, et d'autres horribles maladies industrielles qui menaçaient la Compalim. Il a exprimé son regret d'avoir passé quatre jours en France, - oui, messieurs, je dis bien quatre jours - avant d'entendre prononcer le mot street-marketing ! Il a prédit aux autres les plus grises des carrières s'ils continuaient à se flairer le cul entre eux, comme des chiens de race soucieux de vérifier leur pedigree, - oui, oui, messieurs, je dis bien se flairer le cul - à rabâcher leurs idées copiées-collées…
     Il se faisait apocalyptique, dénonçait cette fascination pour un modèle unique, une pensée unique, qui ne produisait que des produits banals, banaux, - il est finalement revenu à banals, il a annoncé qu'il fallait dans la compagnie des cerveaux neufs, pas encore formatés, du sang exogène, il ne s'arrêtait plus. Le Sphinx paraissait se libérer d'un long silence de plusieurs années, un silence de pierre. Il s'est tu, épuisé, et a demandé une pause café.

(Le passage du Sphinx, L'Étage de Dieu)


* * *
Revue des blogs pour L'Étage de Dieu

Cliquez sur chaque nom pour lire le billet plus complet.

Cathulu, 18/08/08
Vous l'aurez compris ces "Douze nouvelles à la gloire de la libre entreprise" sont aussi grinçantes et cyniques qu'une comédie de Jean Yanne des années 70.

.... du personnel peint avec tendresse, quelques grincements de dents - au total, un beau portrait du monde du travail, avec une prédilection pour l'univers du marketing et de la vente.

Cunéipage, 24/01/07
... On les enchaîne, on en relit une, on en raconte une autre à monsieur qui a déjà vécu exactement ça. On se dit que vraiment, ce qu'écrit Georges Flipo, ça nous plaît...

Fattorius, 16/02/10
Du bon, donc! ... de nombreuses formules bien trouvées, des phrases habiles qui racontent des histoires qu'on dévore, parfois plus denses qu'il n'y paraît se les donner, chez Georges Flipo, ce supplément d'imaginaire qui fait que ses textes deviennent autant de mensonges qui disent la vérité.

Je suis épatée qu'un auteur puisse créer tout un univers, décors, atmosphère et personnages, aussi détaillé en si peu de pages, alors que d'autres ne racontent rien en un roman entier.

Le style dynamique, le discours plein d'humour, Georges Flipo est très agréable à lire. Jamais d'ennui !

Le style des nouvelles est une fois de plus enlevé, pas un mot de trop. Georges Flipo va à l'essentiel. C'est un véritable plaisir de lecture.

Le Blog de Stéphane Laurent, journaliste, Janvier 07
L'auteur sait de quoi il parle et la plupart des textes - délicieusement féroces - qui composent l'ouvrage sont marqués du sceau de l'authenticité.

  
L'entreprise, un conte de fées

  L'Étage de Dieu est un conte de fées pour auteur. Il est bien connu que les fées n'apparaissent qu'à ceux qui y croient.

  Après La Diablada, j'avais proposé à Anne Carrière ce second recueil consacré à la vie des cadres dans les grandes entreprises, mais elle le trouvait trop cruel. Avant de le présenter à d'autres éditeurs, j'ai voulu tenter la carte régionale : je suis nordiste resté incurablement nordiste malgré 30 ans de vie parisienne. Je me suis donc inscrit au Prix Littéraire "Découverte d'un écrivain du Nord-Pas-de-Calais", organisé par Le Furet du Nord et La Voix du Nord.

  Et, pour cela, j'ai envoyé ce manuscrit intitulé Des paniers et des crabes ("12 nouvelles à la gloire de la libre entreprise"). La concurrence est rude pour un prix aussi important, auquel participent les ouvrages édités et non édités, et je me faisais donc peu d'illusions.

  Au début de l'automne, Le Furet du Nord m'appela pour m'annoncer... que l'écrivain découvert, c'était moi ! Et quelques jours plus tard, je déjeunais avec les jurés au Pot du Beaujolais, à Lille. Un repas qui me laisse un grand souvenir, car les jurés n'avaient que des mots aimables. Ils m'ont cependant demandé de changer le titre du recueil et m'ont proposé de retenir celui de la première nouvelle, L'Étage de Dieu. Et c'est ainsi que les crabes ont laissé place à Dieu, ce qui m'a toujours laissé quelque regret :  l'aspect ironique du contenu disparaît.

  L'Étage de Dieu a très bien vécu une courte vie : le tirage de 2.000 exemplaires est maintenant épuisé, ce qui est bien pour une diffusion purement régionale. Mais je dois être honnête, l'appui du Furet du Nord et celui de La Voix du Nord y ont été pour beaucoup : couverture presse, mise en avant dans les magasins... un tel soutien a donné des ailes aux premières ventes, et le bouche à oreille a vite pris la relève.

   Ce recueil a un point fort : il est entièrement centré sur l'entreprise. Ce qui permet aux médias, aux libraires, d'en parler plus facilement. Expérience que j'ai gardée soigneusement en mémoire.

Vous trouverez ci-dessous :

1. un survol des retombées presse


3. puis une sélection des billets dans les blogs littéraires
  
L  ' É T A G E   D E   D I E U